Une découverte exceptionnelle pour la Picardie, le Cucujus vermillon, Cucujus cinnaberinus (Scopoli, 1763)  (Coleoptera Cucujidae).

Dominique Cagniard (Picardie Nature, ADEP), Jean-Hervé YVINEC et Ludivine Conrad (ADEP).

Figure 1 : Photographie d’un Cucujus vermillon (photo Mickaël Blanc) semblable a celui trouvé à Viry-Noureuil.

Longtemps considérée comme une espèce relicte de forêt primaire, Cucujus cinnaberinus (fig. 1), espèce strictement protégée au niveau européen, vient d’être détectée pour la seconde fois en France, dans la vallée de l’Oise en 2022 ; après sa découverte en Alsace en 2014. Dominique Cagniard l’a observé sous forme adulte (deux individus sous une écorce déhiscente près d’un ruisseau) le 10 janvier 2022 lors d’une promenade sur le territoire de Viry-Noureuil (fig. 2). Il s’agit donc d’une découverte exceptionnelle ! Elle montre bien, l’importance des réseaux d’observateurs naturalistes multigroupes comme ceux qui se développent dans les Hautes de France ces dernières années.

Figure 2 : Photographie de l’arbre ou deux adultes ont été observés initialement.

L’espèce éteinte en Europe occidentale a subsisté ponctuellement en Europe de l’est mais semble en expansion depuis peu. Elle a été détectée en Allemagne et dans les Flandres belges ou elle s’est implantée à partir de 2012.  Inscrite à l’annexe II de la convention de Berne et aux annexes II et IV de la directive habitat, faune flore, elle est déterminante pour le réseau Natura 2000. Sa présence implique la mise en place de zone spéciale de conservation et nécessite une protection stricte  car inscrite sur l’arrêté du 23 avril 2007 fixant les listes d’insectes protégés sur l’ensemble du territoire français.  C. cinnaberinus  est  également  considérée comme  une  espèce  parapluie  potentielle  pour la protection des habitats naturels boisés riches en  bois  mort  , en particulier des ripisylves et des forêts matures laissées en libre évolution.

Quelques semaines plus tard, à l’initiative du second auteur, une prospection a été mise en place de manière à vérifier l’implantation de l’espèce sur le secteur.  Après une visite à la station initiale, une investigation sur une zone plus typique en fond de vallée a été décidée. Une zone très humide en fond de vallée avec quelques vieux peupliers a été choisie comme première cible. Une recherche rapide, en 45 minutes et seulement quelques arbres, a permis de réaliser deux observations (Ludivine Conrad et J.-H. Yvinec) distantes de 100 m, toujours sur la commune de Viry-Noureuil. Cette fois-ci ce sont des larves qui ont été observées sous l’écorce de gros peupliers (fig. 3).

Figure 3 : Tronc de gros peuplier dans lequel plusieurs larves ont été observées par Ludivine Conrad.

Cette jolie espèce  est  saproxylique et cryptique,  la  larve  et  l’adulte évoluant  sous  les  écorces  d’arbres  morts ou  mourants. Sa détection est peu évidente à l’état adulte d’après la littérature, car celui-ci n’est présent hors de son milieu de vie larvaire que pendant une très courte période (dispersion, reproduction et ponte) et même à l’état adulte passe donc la plus grande partie de son temps sous les écorces.